La digitalisation du bâtiment, à l’avant-garde de laquelle figure la technologie BIM, réinitialise littéralement le secteur de la construction et de l’urbanisme. Elle laisse entrevoir un formidable potentiel de progrès, notamment durables, de la conception de l’objet à la gestion de ses cycles de vie. Précurseurs en Suisse avec la création d’un atelier BIM il y a dix ans, nous souhaitions offrir à notre département la plus grande autonomie possible, afin de répondre à la demande croissante d’expertise dans ce domaine. Notre nouvelle entité ALWEOL poursuit des objectifs clairs, qu’Adrien Casado, son responsable commercial et BIM Manager, nous explicite dans cette interview.
A+W. Pourquoi avoir fondé l’entité ALWEOL, alors qu’A+W disposait d’un département de digitalisation du bâtiment depuis plusieurs années ?
Adrien Casado. ALWEOL est née en août 2020, avec sa propre forme juridique. Arrivés à maturité dans cette discipline hautement technique, nous souhaitons offrir une garantie d’indépendance et par conséquent une objectivité totale. Nous anticipons également la normalisation du BIM dans les programmes importants et considérons que notre hyperspécialisation constituera un avantage concurrentiel. Grâce à cette indépendance, nous favorisons par ailleurs un équilibre décisionnel entre architectes, ingénieurs structure, ingénieurs CVCE et BIM managers, ce qui pousse à l’excellence au profit du projet, et par extension du client.
À qui vous adressez-vous ?
Notre proposition s’adresse à l’ensemble des protagonistes du marché pour tout ce qui concerne la modélisation digitale du bâtiment et la technologie BIM. Notre expérience des chantiers de grande taille nous prédispose à ce type de mandats ; mais nous répondons aux petits projets avec le même intérêt.
Comment se structure ALWEOL ?
Nous visons la croissance avec une politique de recrutement alignée au volume d’affaires. Pour une société naissante, ALWEOL possède un grand atout dans le potentiel immédiat du groupe pour les grosses missions.
Nous possédons un avantage décisif dans la maîtrise d’outils tels que REVIT, que nous avons enrichi de nos exigences techniques. Notre collaboration avec le CERN, notamment, nous a permis de gagner en expertise et efficacité, pour épargner du temps et de l’argent à nos clients, avec un degré de qualité remarquable, en liant digitalement toutes les phases de constructions à leur origine, depuis le schéma de principe.
Quelle est votre opinion concernant le marché de la digitalisation du bâtiment ?
Cette technologie est une révolution en ce sens qu’elle apporte une nouvelle dimension systémique à la logique de construction. Elle crée une grammaire inédite, non seulement dans la substance de l’objet, mais aussi dans les interactions humaines et techniques sur le projet physique, méthodologique, environnemental et de gestion. Les États-Unis ont imposé cette démarche il y a presque 20 ans, alors qu’en Europe de l’Ouest, particulièrement en Suisse, nous prenons peu à peu conscience de l’importance stratégique du BIM. Mais, la marche du temps nous invite à une mise à niveau rapide, tant les avantages de cette technologie sont extraordinaires.
Quelle est la maturité du marché, selon vous ?
Elle progresse sans cesse, avec la normalisation SIA, qui permet de mieux cerner le chiffrage de la phase BIM, mais aussi l’inclusion de cette dernière dans un nombre croissant de soumissions publiques ou de gros projets.
De plus, nous pouvons aisément démontrer la valeur ajoutée du BIM et dépasser le poncif de l’outil facilitateur interne.
À ce propos, quels sont les avantages pour le client ?
Il faut savoir que la construction physique d’un bâtiment intervient à hauteur de 30 % de son coût global. Le 70 % restant se consomme dans le temps, avec l’entretien, la dépense énergétique, les frais de normalisation, les transformations, la rénovation et la destruction. C’est précisément sur ces 70 % que la digitalisation va impacter, avec une meilleure conception de base et l’optimisation des cycles de vie.
En amont de cela, la nature même du BIM offre au maître d’ouvrage une lecture limpide de son projet, avec la liberté d’en faire évoluer certains aspects ou fonctionnalités afin de l’aligner à sa vision. Pour les intervenants techniques, le travail sur une maquette commune permet de superposer les calques et d’optimiser considérablement les fonctionnalités.
Pour résumer, les avantages majeurs du BIM se déclinent sur 3 points :
1. Il permet au maître d’ouvrage une visualisation claire de son projet, et d’apporter tout type de modifications et d’évolutions en phase de conception.
2. Il permet aux intervenants techniques une interaction très efficace sur une seule et même maquette.
3. Il permet d’intervenir à la baisse sur la part de 70 % des coûts du bâtiment.
Pour conclure, en quoi le BIM vous passionne-t-il ?
Il me projette dans l’avenir, mais aussi dans la dimension historique. Imaginez ce que serait aujourd’hui le patrimoine de l’humanité si les pyramides d’Égypte et autres merveilles de l’architecture avaient bénéficié du BIM ! Au lieu de faire des suppositions, nous saurions exactement comment seraient construits et renseignés les édifices historiques, leurs espaces et contenus. Par exemple, si les statuettes retrouvées dans le tombeau de Toutankamon avaient été intégrées dans un modèle BIM, on aurait pu connaître leur usage, leur auteur, leur composition, leur histoire, etc.
De plus, le BIM exprime une composante de durabilité, notion qui m’est chère et que je souhaite mettre à profit de la construction. Je m’inscris dans cette démarche : contribuer à une vision éthique de la construction et laisser un héritage technique irréprochable aux générations futures.