Étienne Villemot, ingénieur en bâtiment et architecte, a pris la tête du pôle consulting de notre agence lyonnaise depuis le début de l’année. Artisan de notre développement dans l’Hexagone dès notre implantation en 2014, il possède le privilège de suivre le dossier des Opéras de Paris, pour lesquels A+W SAS intervient en conseil et en maîtrise d’œuvre sur l’exploitation et le confort. Quelques questions posées à ce passionné éclectique.
A+W. Sur quelle problématique avez-vous été interrogé par les Opéras de Paris ?
Étienne Villemot. Depuis 3 ans, nous travaillons principalement sur la thématique du confort, dans la dimension thermique et la qualité de l’air, pour l’Opéra Bastille. Nous sommes également intervenus sur diverses missions de maîtrise d’œuvre sur les installations techniques de traitement climatique. La pandémie de COVID-19 pose des questions importantes sur le fonctionnement des installations de traitement d’air vis-à-vis de la sécurité sanitaire, et les Opéras de Paris ont souhaité faire appel à A+W pour les accompagner sur cette problématique sur l’opéra Bastille et le Palais Garnier.
Chaque type de bâtiment possède une spécificité énergétique liée à son usage. Qu’en est-il d’un opéra ?
Les salles d’opéra sont des lieux complexes, faisant cohabiter simultanément plusieurs catégories d’activités dans des espaces de très grandes dimensions et peu ou pas cloisonnés, mais présentant des volumes distincts. Le flux et la qualité de l’air de la fosse d’orchestre, de la scène, des coulisses, des différents étages réservés aux spectateurs ( 2e balcon, 1er balcon, parterre) doivent être équilibrés et assainis, afin de garantir confort et stabilité.
Par exemple, la salle principale comporte 2 745 places. Elle mesure 20 m de haut, 32 m de profondeur et 40 m de large ; face à elle, la cage de scène fait 65 mètres de haut, 30 mètres de large et 25 mètres de profondeur. Et derrière le rideau, le plateau technique offre un volume 8 fois supérieur. On trouve ainsi différents « climats », qu’il faut réguler thermiquement. L’enjeu du traitement climatique et de la gestion des équipements techniques est de composer sur la gestion des flux d’air mécaniques (ventilation) pour amener la chaleur et l’air neuf au bon endroit, tout en « jouant » avec les micro-climats qui se créent d’eux-mêmes à l’intérieur des différentes zones.
Comment avez-vous appréhendé ces spécificités ?
Nous sommes entrés dans « la maison » dans le cadre d’un audit sur le confort thermique de la fosse d’orchestre il y a 3 ans. Nous avons procédé à un audit thermique recourant notamment à des tests de fumée, des mesures de températures, des entretiens et des constatations in-situ. Ce travail a révélé plusieurs causes à des courants d’air importants, dont des fenêtres laissées ouvertes à 30 m de hauteur. Ces ouvertures provoquaient une rupture d’équilibre se ressentant jusque dans le parterre. À la suite de cet audit, nous avons travaillé sur des plans d’actions d’amélioration sur les causes diagnostiquées, et qui comprend des modifications de la façon de régler les installations techniques, tout autant que des interventions liées à des travaux importants dans l’édifice. Les retours des musiciens sont très positifs, sur l’amélioration de leur confort et de leurs conditions de jeu. En particulier, la stabilité hygrométrique est un prérequis, car les instruments de musique sont très sensibles aux variations de l’humidité, tout comme le son.
Que prévoient les Opéras à court terme, dans la situation actuelle ?
Le contexte pandémique actuel a contraint les Opéras à fermer leur exploitation au public, et à n’envisager leur réouverture qu’avec une jauge limitée de 1'000 personnes. Les Opéras de Paris nous ont missionné dans un premier temps pour évaluer le fonctionnement des installations de ventilation, et proposer des protocoles de fonctionnement minimisant les risques de transmission du coronavirus tout en conservant un bon confort thermique. Ces protocoles comprennent la suppression du recyclage d’air au profit d’une plus grande arrivée d’air neuf, l’augmentation du temps de fonctionnement des installations et la mise en place de « purges » régulières des espaces publics.
Ces protocoles mis en place, nous travaillons maintenant sur la mise en place de capteurs pour suivre en continu la qualité de l’air et vérifier l’absence de stagnation. Et nous assistons les Opéras de Paris sur la justification des conditions sanitaires, en lien avec des études universitaires et des simulations.
Quelle impression retirez-vous de cette mission ?
Que je fais un métier passionnant, diversifié et fondamental. En effet, quel que soit le type de bâtiment et d’activité, notre rôle est de travailler avec notre maître d’ouvrage pour assurer un fonctionnement énergétiquement performant et générer un confort optimal. Travailler pour les Opéras de Paris est un privilège, car nous participons à notre façon à une certaine élévation artistique.
Avez-vous d’autres projets parisiens ?
Nous avons plusieurs mandats en cours, en fluides et en qualité environnementale. Pour nous rapprocher de nos clients, nous avons ouvert une agence parisienne au mois de septembre 2020. Nous pouvons désormais assurer une permanence et être immédiatement disponibles sur place.